L’ODEUR D’UN FEU DE CHEMINEE
PRENDRE l’ODEUR d’un feu de cheminée par les sentiments
Ça se passe souvent en fin de journée. Après avoir vadrouillé dehors, les épaules rabougries par le froid, les mains rentrées dans les poches ou dans les manches de son pull en laine, les pieds et les oreilles complètement gelés, la peau qui frissonne à s’en faire claquer les dents, le nez humide et les joues rosies par le vent glacé, qui nous presse d’aller à l’intérieur. « Ah ! On se les pèle, vivement de rentrer ». On se presse pour se mettre au chaud, retrouver une température agréable et mettre fin au plus vite à l’expérience du froid. Et c’est là, à ce moment-là, lorsque la porte s’ouvre, que la chaleur devient une promesse accessible.
« On n’allumerait pas un feu ? »
La question est soutenue par un air très sérieux dont la réponse n’attend rarement pas, suivie par un oui affirmatif. Ce programme s’introduit toujours avec un frottement de mains décidé et enthousiaste, suivi d’un « allez » convenu.
La scénographie se met en place : panier en osier et son parfum de raphia, fines branches et autres petits bois secs, quelques bûches bien faites sélectionnées avec soin, en priorité celles où les écorces sont plutôt sèches malgré les petits bouts de mousse et de terre humide çà et là, sans oublier le vieux papier journal qui sent la poussière, peut-être même un bout de carton, et bien sûr allumettes ou briquet à la main — au choix. On s’accroupit devant la cheminée. Ici, on choisira une cheminée à l’ancienne, plutôt qu'un poêle moderne. Une jolie cheminée, en pierres un peu austères, à l’odeur de vieux, comme dans une église, diffusant un mélange entre les relents de cendres froides, de suie, de brûlé et de charbon carbonisé, donné par les bois noircis du feu de la veille.
Allumer un feu est une affaire de haute importance. C'est un pouvoir. Car le rater revient à bafouer toutes les générations précédentes en remontant jusqu’à la préhistoire. Petite pression tout de même. On installe le petit bois sec en premier avec sa douce odeur de crayon à papier, on chiffonne ensuite le papier journal, on ajoute quelques fines branches – pour être sûr que ça prenne – et seulement là, on fait craquer l’allumette qui nous claque au visage avec son odeur de « chaud » puissante et dense. Quelques braises viennent animer la scène.
Attention, ça arrive. Mais avant, on souffle avec une grande expertise sur les étincelles les plus prometteuses. L'enjeu, ici, est bien d'attiser les flammes. L’odeur de fumée prend le pas sur tout le reste, elle nous pique les yeux jusqu’à nous faire tousser. Voilà que le bois commence à chanter. Là, on y balancera à pleines mains une belle bûche, parfois deux, pour que le feu s’embrase et débute sa danse. « Qu'il est beau, ton feu ! », phrase lancée nonchalamment pour célébrer ce succès devenu ordinaire, à en faire la fierté de nos ancêtres. Il nous offre un parfum de bois à peine perceptible, qui embaume surtout l’air à l'extérieur, parfum réservé aux aventuriers restés dans le froid, car ça y est :
« dehors, ça sent l’hiver et le feu de cheminée des vieilles maisons de campagne »
Il ne fait pas tout à fait jour, ni tout à fait nuit. C’est le moment parfait pour aller s’y blottir, au coin du feu. Il y a sans doute plusieurs écoles, mais tout commence par une salutation. D’abord, on tend les mains juste au-dessus en écartant bien les doigts en étoile. En arrière-plan, on contemple le jeu de voltige des flammes indécises, sur un fond de musique crépitante. Les yeux, comme hypnotisés, n’en décrochent pas tout de suite, on peut s’y perdre pendant des heures. Pour finir, on se retourne pour avoir le feu dans le dos, histoire de réchauffer notre corps entier qui réclame aussi sa part de chaleur. Les fins connaisseurs ont en général les mains jointes au milieu des fesses – pour les réchauffer encore un peu – et les genoux qui se plient machinalement à peine deux ou trois fois comme pour mieux en capter la chaleur.
Seulement là, on tempère son esprit refroidi par la vie. « Qu’est-ce qu’on est bien, ici, avec ce feu de cheminée. » La relaxation est totale. Oui, car, il fallait d’abord connaître le froid de canard pour en savourer toute l'ardeur. Jusqu’au coup de chaleur de trop.
TOUT SAVOIR SUR L’ODEUR DU FEU DE CHEMINEE EN PARFUMERIE FINE
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L’odeur du feu de cheminée en parfumerie est la re-création d’une odeur, que l’on appelle “accord”, recomposée par la main de l’Homme à l’aide de différentes matières premières issues de la palette du parfumeur, qu’elles soient d’origine naturelle ou reconstituées en laboratoire.
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AU NEZ
L’odeur du bois qui brule, fumé, sec, poudré, crépitant, brûlant, cendré. Les notes boisées sèches se cassent parfois la figure contre les odeurs de pierre froide de la cheminée.
PAR LES SENTIMENTS
Réconfortant, chaleureux, apaisant, calmant, nous envoûtant avec son exubérance méditative, ses airs familiaux, et son côté littéraire, donné par le papier journal.
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FAMILLE : Bois